lundi 2 avril 2018

Enfer

À la veille de Pâques, le pape François a, paraît-il, dit que l'enfer n'existe pas. Enfin, une bonne nouvelle, mais pour qui ? Pense-t-on vraiment, même dans les milieux les plus catholiquement conservateurs ou les plus islamiquement fanatiques, que c'est la crainte de l'enfer qui empêche les gens de faire ceci ou cela, tromper feur femme ou voler, ou même tuer ? Pourquoi les hommes auraient-ils besoin de cette menace, aussi infiniment lointaine que la mort, pour se comporter raisonnablement ? Je lis les propos d'un philosophe dans l'Express : la création divine de l'Enfer serait le truchement par lequel Dieu garantirait à l'homme sa liberté. La liberté de faire le mal ? celle de faire le bien ?  De quoi est faite cette liberté, bien illusoire, puisqu'elle se réduirait à celle d'un choix entre le bien et le mal, l'enfer et le ciel ? Comme tous les choix, celui-ci plombe nos actions de tous les possibles avortés par notre engagement dans le quotidien. Ces possibles n'ont d'existence que dans notre tête. Ce sont des abstractions. Des rêves qui ne sont même pas véritablement rêvés. Des fantasmes individuels certes, mais si peu personnels. 

La déclaration du pape a aussitôt été démentie par le Vatican. "Ouh là là ! Vous êtes complètement fou de dire une chose pareille ! Environ un milliard et demi de catholiques (un cinquième de l'humanité) vont se déchaîner et en profiter pour faire tout ce qu'ils veulent, sans plus se préoccuper des sanctions divines. Vous imaginez le bordel ! On tombe dans les arguments du Grand Inquisiteur de Dostoievsky : "Si Dieu n'existe pas, alors tout est permis."  Mais non, voyons. Comme si l'on avait besoin d'une permission quelconque pour faire quoi que ce soit. C'est ridicule." 

L'Enfer, c'est pour les enfants, qui, d'ailleurs, s'amusent avec la peur que cette histoire peut susciter en eux. À sept, huit ans, on aime avoir peur de sa propre imagination, celle-ci étant nécessairement requise pour faire exister la création divine de l'enfer.

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