lundi 29 février 2016

Foi

Nous sommes allés manger à la Fabrik, hier soir, un nouveau restaurant semble-t-il, situé près de la Gare à Mersch, rempli de la jeunesse locale, mais il n'y avait plus de place, ce qui fait que l'on a commandé, Charlotte une pizza, moi un Tartare, que nous avons mangé dans la salle où je prends tous les matins mon petit déjeuner, en face de ma chambre à l'Hôtel Sigefroid de l'internat. Cela m"a permis de voir les informations sur France 2.

J'ai fait, comme toujours, beaucoup de rêves cette nuit. L'un d'eux portait sur la foi, un état de foi qui, pour être authentique, doit refuser toute raison, toute intelligence critique. Croire, ce serait seulement croire absolument, sans le moindre doute. Cela exigerait une fermeture complète à toute incertitude et, à dire vrai, une telle foi résulterait d'une décision, la décision d'être bête, faire le sacrifice de ses propres capacités de raisonnement. Ce ne serait qu'à cette seule condition que la foi pourrait vous apporter une sorte de réconfort associé au divin, à la transcendance. Les images que ce rêve évoque sont très floues, mais je vois deux membres du clergé — des jésuites ? —avec des options divergentes sur cette question. Peut-être ce rêve est-il né de la discussion que j'ai eue récemment avec Martine quand nous avons parlé de l'abbé Chauveau et de René Naegert, "le Pope", qui furent pendant un certain temps des amis de notre famille à Strasbourg.


dimanche 28 février 2016

Korzybski

Je tourne le dos à la grande baie vitrée qui donne sur les collines boisées de la ville de Luxembourg. Nous sommes arrivés hier soir, après avoir mangé dans notre restaurant de sushis habituel. Très bon comme d'habitude mais avec des prix luxembourgeois. J'ai pris un bus pour aller de l'aéroport à la gare où Charlotte m'attendait. Toute belle. Très dynamique. Nous avons discuté un peu de tout. De son école et des films qu'elle venait de voir sur son ordinateur. De ses lectures aussi. Elle lit les nouvelles de Maupassant, actuellement.

Parmi les nombreux rêves que j'ai fait cette nuit, il y en a un qui insiste. J'étais avec Jean. Nous allons voir sa soeur qui habite à la lisière de la ville dans une sorte de favella misérable. Mais cette soeur se transforme en un frère qui nous invite. Son chauffeur habituel n'est pas disponible. Il vit dans une cabane de pauvre mais il est riche.

Dans l'avion, j'ai parcouru un petit livre d'Alfred Korzybski : Prolégomènes aux systèmes non-aristotéliciens et à la Sémantique générale. Il s'agit d'extraits choisis de ses ouvrages principaux. Ça date un peu mais c'est quand même intéressant. Korzybski voulait résoudre tous les problèmes politiques grâce à la sémantique générale. Tous les conflits, selon lui, proviennent d'une mésentente sur le sens que nous donnons aux mots quand nous communiquons les uns avec les autres. Comme je lisais également les débats sur l'anthropologie organisés par Tim Ingold à la fin des années 80, où l'on voit les anthropologues se parler souvent "at cross purposes" et le reconnaître aisément, il y avait une sorte de coïncidence ironique à rapprocher ces deux textes, si éloignés l'un de l'autre.

samedi 27 février 2016

Inamical

Pourquoi enfonce-t-il ma valise en carton gris d'émigré portugais dans l'eau ? Elle flottait et il me propose d'aller la chercher. J'y consens mais au lieu de me l'apporter, il l'enfonce dans l'eau du lac. J'entends le bruit de l'eau qui pénètre dans la valise, mouillant la chemise toute neuve que je venais d'acheter. J'ai trouvé ce geste inamical. Ensuite, toutes les chambres sont prises. La seule disponible est une sorte de trou, assez sale, aux voies d'accès difficiles. Je m'y résoudrai sans doute mais l'accueil me fait penser que c'est fini.

J'ai écrit ce qui précède après m'être levé à 6h42. Il pleuvait abondamment dehors. Aujourd'hui je m'envole pour Luxembourg. Ce rêve traduit une sorte d'appréhension qui n'est pas exceptionnelle. Ni peur ni angoisse mais comme une réserve. Hier soir j'ai vu le documentaire que nous avait recommandé Julia avec Mathieu Ricard qui nous invite à l'altruisme à travers la méditation. Les écoles du monde occidental et d'ailleurs auraient bien besoin d'inscrire cette pratique de la méditation à leur programme.

Il est maintenant 7h31. Une sorte d'immense nuage gris foncé a posé son couvercle sur les collines de Lisbonne. Un nuage de fin du monde, un peu effrayant par l'obscurité qu'il génère. La pluie ne cesse pas. Comme celle des atomes dans Lucrèce.

Je rajoute la référence d'un article du Guardian que j'ai lu ce matin :
http://www.theguardian.com/lifeandstyle/2016/feb/27/how-to-raise-a-brilliant-child-without-screwing-them-up?utm_source=esp&utm_medium=Email&utm_campaign=GU+Today+main+NEW+H&utm_term=159060&subid=13292981&CMP=EMCNEWEML6619I2

vendredi 26 février 2016

Insomnie

Généralement, je gère assez bien mes insomnies. Non seulement je ne les crains pas, mais elles me permettent de penser à des tas de choses de manière très tranquille. J'en profite pour avoir des idées et boire un verre d'eau de temps en temps. Cette nuit, cependant, ce fut un peu différent. Commencée à 2h30, elle m'a tenu réveillé jusque vers 5h30. La langue me présentait des mots, beaucoup de mots, sans ces aspérités dont j'ai besoin pour en faire quelque chose. Puis, je me mis à réfléchir sur l'insomnie elle-même. Celle-ci a une dimension paradoxale. On est réveillé, bien réveillé et on ne peut pas s'empêcher de regretter de ne pas être endormi, tout-à-fait endormi. Veut-on se rendormir ? Les mots, en rangs serrés, nous en empêchent. On se rend compte qu'il faudrait une image, une seule image sans aucun mot susceptible d'en reconnaître les aspects essentiels, pour que l'on réussisse. Une image de ce genre m'est apparue vers 5h30 : une sorte de mur en ruines d'où s'échappaient des bouffées de fumée bleue, ou plutôt des traînées lentes de fumée bleue.

jeudi 25 février 2016

Cadi

C'est cet objet moderne, conçu semble-t-il en Alsace et qui a envahi la planète toute entière, qui a mobilisé mes capacités oniriques cette nuit : le cadi.
Je critiquais cet objet dans mon rêve. Objet mono-fonctionnel, à l'esthétique plus que douteuse, qui forme, une fois emboîté avec ses semblables, des chenilles d'au moins une vingtaine de mètres, se contorsionnant difficilement pour éviter les passants. Poussées par des commis aux tabliers gris, ces chenilles gémissent de toutes leurs petites pattes rouges en forme de roues affolées, secouées de petits cris métalliques désaccordés dont l'ensemble forme une sorte d'accord dissonant de partout, avant de s'immobiliser, en attente. Parfois, les cadis ne se désemboîtent pas facilement comme s'ils ne voulaient pas quitter leur bande. Il faut forcer un peu. Le métal rechigne. Allons, bon ! Voilà. Le cadi s'ébroue mais l'une de ses petites pattes rouges est faussée, il tire vers la gauche, pas facile de le diriger entre les rayonnages. Rien de plus triste qu'un cadi vide, que le vide d'un cadi, souvent souligné par une feuille de salade délaissée, qui n'est là que pour colorer ce vide, le manque de tout ce qui peut le remplir, l'absence de tout ce qui l'a rempli et qui s'en va, dans le coffre d'une voiture, vers la maison. Le cadi n'est-il pas le symbole le plus puissant de notre civilisation moderne, l'objet ultime, le squelette hebdomadaire —vendredi ou samedi — de tous nos désirs quotidiens de supermarché ? 
Parfois les cadis s'échappent et quittent leur nid de néon. On en retrouve dans le canal Saint Martin, leurs petits os fins couverts de vase. Parfois on les voit tout seuls, perdus sur un trottoir, ignorés de tous. Ils n'ont rien à faire là. 

mercredi 24 février 2016

Bouger

Je bouge beaucoup dans mes rêves : je cours, je marche, je saute, je vole... Je ne nage guère, c'est vrai. Cette nuit je marchais de manière tout-à-fait obsessionnelle, en plaçant mes pas tous les trois ou quatre pavés du trottoir. En fait, nous étions deux, et nous faisions une sorte de course. Mais sans la prendre trop au sérieux.

Le fait d'en avoir entendu parler avant-hier m'a donné envie de rouvrir l'ouvrage de Lucrèce, le De rerum natura, que j'ai commencé à relire.

Sinon, rien de bien nouveau dans mon petit monde. Charlotte m'a écrit un très gentil message malgré sa tristesse liée à une rupture avec son ami franco-russe. Mais elle est vaillante. Elle me dit qu'elle a envie d'écrire à Sasha. A part cela, je lui ai parlé d'Aristote et sa définition de l'argent, comme "substitut du besoin", ce qui veut dire que l'argent (la monnaie) est le signe (social) de l'expérience que nous faisons, nous les humains, du manque (le besoin). Ce dont on peut inférer que plus on a d'argent, plus on manque. L'homme riche est celui qui manque le plus. C'est pour cela qu'il est beaucoup moins généreux que l'homme pauvre. Bon ! me voilà en train de re-parcourir les allées conceptuelles de ma thèse de doctorat. Dans un langage plus simple et plus radical, évidemment. Mais cela n'intéresse sans doute plus personne.

mardi 23 février 2016

Lucrèce

Je suis allé écouter David Webb hier à l'Université de Lisbonne au Centre de Philosophie des Sciences. Il concluait un petit colloque international sur l'atomisme, notamment. L'intervention de David a été magnifique : une interprétation de Lucrèce inspirée par Michel Serres et qui soulignait les parentés entre Lucrèce et Lee Smolin. Du moins c'est le nom que j'ai compris à partir de la référence à la théorie des cordes que David a évoquée. J'ai lu Rien ne va plus en physique de Lee Smolin, il y a quelques années. Cela m'a donné envie de relire certains passages et de les comparer avec le De rerum natura de Lucrèce. Mais je ne m'aventurerai dans ces eaux-là qu'après avoir terminé mes tâches actuelles en liaison avec Luxembourg.

Petite remarque sur ce blog : quand je vois que certaines pages anciennes (datant de deux ou trois ans) de ce blog ont été consultées, il m'arrive d'aller les relire moi aussi — et, généralement, de supprimer l'affichage de la date puisque celle-ci est indiquée par le logiciel lui-même—. Ceci dit, je tombe, assez souvent, il faut le dire, sur des récits de rêve, ceux que mes enfants, Fabien et Célia, n'aiment pas trop voir figurer dans mes messages. Mais, ces relectures m'étonnent dans la mesure où, quand je relis ces rêves, souvent très anciens, je revis les émotions qui accompagnaient leur mise en récit et qui étaient, apparemment, celles que le rêve lui-même pouvait avoir suscitées. Dès les premiers mots, je revois certaines images de ces rêves, je revis les sensations vécues en les rêvant. Je trouve cela assez étrange. N'oublie-t-on pas nos rêves ? Surtout ceux qui, par leur absurdité, devraient s'effacer rapidement ?

lundi 22 février 2016

Maths

Hier soir, sur Arte, il y avait un documentaire sur les maths : Comment j'ai détesté les maths d'Olivier Peyon avec Cédric Villani, Jean Dhombres, Jean-Pierre Bourguignon, etc. J'ai trouvé ce film très superficiel et tombant dans beaucoup des travers de la vulgarisation scientifique. Par exemple, on montre des tableaux noirs (ou verts) couverts de formules mathématiques, dont on ne dit rien, pas plus qu'on ne dit quoique ce soit sur l'écriture mathématique. Alors que c'est bien là que ça se passe : à la surface d'un tableau ou d'une feuille de papier, non ? Bref c'est un film qui ne fait qu'épaissir ce qu'il y a de mystérieux dans cette passion qui habite certaines personnes. On évoque les banques et les "produits" financiers, ces formules que les mathématiciens inventent pour diminuer les risques dans le cadre de spéculations financières. Mais cela va trop vite. On pouvait espérer qu'un film sur les mathématiques nous ferait comprendre quelque chose... Mais non, rien. On est soit dans l'amour des mathématiques soit dans leur détestation complète comme la grande majorité des élèves ordinaires. Cedric Villani se promène dans — sur ? — les images avec beaucoup de grâce et d'élégance. Dhombres est manifestement très content d'être dans le film.

L'après-midi, nous sommes allés voir une exposition d'oeuvres de Robert et Sonia Delaunay à la Fondation Gulbenkian. Sonia et Robert Delaunay ont passé deux années au Portugal et y ont laissé des traces auprès de certains peintres portugais. Ce n'est pas une peinture que j'apprécie énormément mais c'est vrai qu'elle exige un temps de contemplation assez long pour "percevoir" où veut nous emmener l'auteur du tableau. D'ailleurs juste avant le film sur les maths, il y avait une émission sur le peintre Fromanger, qui fait saigner le rouge des drapeaux. Les drapeaux saignent mais ne meurent pas. Malheureusement.

Enfin, j'apprends que Boris Johnson, le maire de Londres, s'est prononcé pour le Brexit. Sans doute une manoeuvre politicienne pour prendre la place de David Cameron à la tête du gouvernement. Il n'est pas impossible que ça ne réussisse pas. Quant à Evo Morales, les sondages le considèrent comme perdant la possibilité de briguer un troisième mandat. Mais rien n'est joué et l'on peut avoir des surprises.

dimanche 21 février 2016

Heidegger ?

Hier soir, nous avons reçu David Webb et Zbyszek, Isabel Serra et son mari, Joao à dîner. J'avais préparé un boeuf bourguignon avec une purée de pommes de terre au céleri, et pour commencer une grande salade verte. Ils avaient apporté le dessert et le vin. Très chaleureux mais un peu long comme dîner : ils sont partis à minuit, après avoir bien bu. Isabel s'endormait. Trois langues se croisaient au dessus de la table : l'anglais, le français et le portugais. David Webb est un philosophe britannique qui s'est spécialisé dans la "philosophie continentale" et plus spécialement la phénoménologie. Ils ne sont pas nombreux en Angleterre, à lire Deleuze, Lacan, ou même Husserl ou Heidegger. En tout cas, cela m'a permis de participer à la discussion. Nous avons évidemment évoqué les Cahiers noirs de Heidegger, qui viennent d'être publiés en allemand et partiellement en anglais. J'attendrai leur publication en français pour en prendre connaissance. Heidegger s'y révèle dans toute sa superbe nazie, qui n'avait rien d'un vernis superficiel destiné à sauver la philosophie allemande. La critique que j'ai lue dans Le Monde est accablante pour ce philosophe dont j'ai toujours détesté les textes, même à l'époque où il figurait comme le chouchou de la philosophie française. Pour moi, il s'agit d'un penseur détestable, qui aussitôt en poste grâce à Husserl, a complètement laissé tombé celui qui l'avait soutenu. Je me souviens que, quand je me suis lancé dans le domaine "STS", certains de mes amis me disaient : "Il n'y a rien à faire là dedans. Heidegger a tout dit dans ses Conférences sur la science et la technique." J'ai lu ces "fameuses" conférences et j'ai été terriblement déçu. Elles puaient l'arrogance et la prétention.

samedi 20 février 2016

Eco

Umberto Eco vient de mourir. Bien que ses centres d'intérêt aient été proches des miens, ce n'est pas un auteur pour lequel j'avais beaucoup de sympathie. Peut-être à cause de son arrogance à laquelle je me suis personnellement frotté quand j'ai participé à un séminaire au Mali. Il était là. François Jullien était là aussi. Plus quelques autres. Nous étions une douzaine. Je l'ai beaucoup filmé à cette époque. Entre lui et Jullien, c'était une sorte de concours d'arrogance. Nous sommes allés à Bamako dans un premier temps, puis à Tombouctou, qui était encore intact à l'époque. Il n'a pas aimé mon intervention qui, si je me souviens bien, a été l'origine d'un petit article que Jean-Marc a publié dans la revue Alliage et qui, reste à mes yeux, la contribution la plus intéressante que j'ai pu faire dans le champ de ma spécialité STS (Science, Technologie, Société). L'article a été publié sous le titre "La science, une écriture parlante", titre que je modifierais maintenant si j'en avais l'occasion, en raison d'une nuance qui fausse un peu son sens par rapport à l'article. (On peut trouver l'article à cette adresse sur internet : <http://www.tribunes.com/tribune/alliage/37-38/jurdant.htm>) Je vous cite la phrase qui me semble donner toute sa portée à ce petit article : "Imaginons maintenant que ce que l'usage de la parole pourrait avoir perdu en passant, à cause de l'écriture, d'une oralité primaire à une oralité secondaire, un usage particulier de cette même écriture se soit spécifié pour le retrouver." [Oralité primaire et oralité secondaire font ici référence à des concepts créés par Walter Ong qui définissent, pour la première, le régime de la parole dans une société qui ne connait pas l'écriture et, pour la seconde, le régime de la parole dans une société, non seulement qui connaît l'écriture, mais encore, qui la pratique à tous les niveaux de la hiérarchie sociale, ce qui est le cas de la Grèce au Ve-IVe siècle avant Jésus-Christ.] Bien entendu, cet "usage particulier de l'écriture", dans mon esprit, renvoie aux spécificités de l'écriture scientifique. C'est le thème que je vais développer le 8 avril prochain, au séminaire du CELSA.

A signaler également la mort de Nelle Harper Lee, l'auteur de To Kill a Mockingbird, ouvrage que je n'ai pas encore lu et qui, malheureusement ne semble pas disponible sur Kindle.

Enfin, je viens de lire cette belle phrase de Robert Jaulin : "Le non-être ne saurait précéder l'être, précisément parce que celui-ci n'existe que de s'inventer." in L'univers des totalitarismes, p. 68.

vendredi 19 février 2016

Ismaélisme

Sur cette question de répétition que j'ai évoquée hier, il faut nuancer. Je disais qu'il est possible que l'on fasse toujours le même rêve de la même manière que l'on peut dire d'un écrivain qu'il écrit toujours le même livre même si sa bibliographie comprend beaucoup d'ouvrages différents. Je crois que Patrick Modiano disait cela de son oeuvre et l'on peut certainement le dire de Georges Simenon et de beaucoup d'autres auteurs. Comme si le rêve — ou le roman —était la tentative toujours renouvelée d'exprimer quelque chose qui ne réussit pas à rejoindre un achèvement, une complétude, qui rendrait toute tentative supplémentaire superflue, et pour le coup, totalement redondante.

Le ciel est à nouveau dégagé de toute trace de quoi que ce soit aujourd'hui mais, comme j'ai pu le constater hier ou avant-hier, cela ne veut pas dire que la journée maintiendra cette magnificence du matin. Souvent les nuages se précipitent sur un ciel si alléchant qu'ils en dévorent les trois quarts ou même la totalité dès avant midi.

J'ai terminé hier Le vieux de la montagne et la fin est assez terrifiante : on pourrait très bien imaginer Al-Bagdadi, le chef suprême de l'EI, animé des mêmes principes à la fois religieux et militaires que Hassan, ce héros du XIe siècle qui finit par se tailler un immense territoire au détriment du califat des Turcs. Bien que le personnage soit présenté comme une sorte de sage en bute avec des  traîtres et des puissants corrompus, il n'en est pas moins amené à faire régner une sorte de terreur sanglante dans les territoires qu'il convoite et annexe au nom de l'ismaélisme, qui pourtant, historiquement, définissait un courant très tolérant vis-à-vis des systèmes de croyances contemporains.

Enfin je signale un bon article dans Libé ce matin : "A l'écoute de parents tyrannisés par leurs enfants" par Sarah Finger, que l'on trouvera à cette adresse <http://www.liberation.fr/france/2016/02/18/a-l-ecoute-de-parents-tyrannises-par-leurs-enfants_1434379?xtor=EPR-450206&utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=quot>
L'article évoque un problème dont nous avons beaucoup discuté avec Vincianne. Pas facile.

jeudi 18 février 2016

Répétition ?

Jean-Pierre [mort il y a trois ans] et moi sommes convoqués avec mon père dans le bureau du directeur, un samedi. L'entreprise est vide et nous parcourons de nombreux couloirs. Nous entrons même dans une sorte de véhicule qui ressemble au train fantôme des foires de mon enfance. Le directeur nous fait attendre. Un autre employé, Kado, est là. Le directeur [qui ressemble à Bernard Cammas, l'un des directeurs d'Alcatel quand j'étais à Strasbourg, en plus féroce et agressif] nous donne à chacun une lettre. Pour mon frère et moi il s'agit d'un licenciement. Pour Kado, c'est une promotion. On me reproche de ne pas être assez strict sur les détails du protocole. Et, en effet, je reconnais volontiers que je fais les choses à ma façon, qui est loin d'être stricte. Comment vais-je annoncer cette mauvaise nouvelle à ma famille ? En attendant, buvons un coup. L'étiquette de la bouteille indique "Jardin des Morts" [allusion très directe au Jardin des Sciences dont j'ai été l'initiateur à Strasbourg]. Je me dirige vers ma maison pour annoncer la nouvelle à I. [J'hésite entre Irène et Isabel]

Je me demandais, après avoir fait ce rêve et surtout après avoir longuement pensé à la formulation du récit que j'en ferais, si, en fait et au fond, on ne faisait pas toujours le même rêve. Comme s'il s'agissait d'un message qui insiste : chaque nuit, le même message, apparemment incompréhensible, donnant lieu à des images différentes certes, mais si éphémères en tant qu'images justement.

Sur le plan des lectures, j'ai commencé L'Univers des totalitarismes. Essai d'ethnologie du —non-être— de Robert Jaulin (Editions Loris Talmart, 1995). C'est Eric qui m'a prêté ce livre dont deux exemplaires d'occasion sont en vente sur Amazon pour 156 euros chacun. J'ai lu l'introduction (particulièrement difficile) et j'ai commencé le corps du texte que l'auteur situe dans le droit fil de La Paix blanche, livre qui m'avait fait forte impression au moment où j'écrivais ma thèse de troisième cycle sur la vulgarisation scientifique. Mais en même temps — cela dépend de mon humeur — je suis en train de terminer Le vieux de la montagne, de Freidoune Sahebjam, (Paris, Grasset, 1995 — cadeau de Christine et Eric) qui raconte l'ascension sociale de Hassan Sabbah, grand ami du poète Omar Khayyam, qui, au XIe siècle à Ispahan, à travers le culte de Ahura Mazda et grâce aux conseils du vieux sage Zarathoustra, tente de restaurer la grandeur des Perses contre la domination des Turcs. Passionnant. Et très actuel.

mercredi 17 février 2016

AURDIP

Encore un ciel magnifique. Il fait froid, certes, mais il n'y a pas la moindre trace de nuage ou d'avion ce matin au dessus de Lisbonne. Belle journée en perspective.

Les nouvelles de France ne sont pas bonnes. Il y a d'abord cette politique pro-israélienne obstinément partiale qui affecte la liberté d'expression notamment en ce qui concerne la campagne BDS. Le gouvernement continue à poursuivre les personnes qui soutiennent cette campagne sous prétexte d'anti-sémitisme alors qu'il ne s'agit évidemment pas d'anti-sémitisme. La défense des droits des Palestiniens est non seulement légitime mais une exigence éthique. Israël ne respecte aucune des décisions de droit international prise par l'ONU. Ce scandale politique dure depuis plus de 50 ans. J'ai reçu aujourd'hui le bulletin de l'AURDIP —envoyé par Josiane mais dont vous pouvez trouver l'adresse internet ici : <http://www.aurdip.org/newsletter-de-l-aurdip-du-16> — qui demande des adhésions supplémentaires pour pouvoir lutter de manière plus efficace contre les décisions arbitraires du gouvernement sur ce dossier. Il me semble important d'adhérer.

mardi 16 février 2016

Vinciane

Voilà : Isabel est allée chercher Vinciane, la fille aînée de Pierre, à l'aéroport, hier soir à minuit. Moi, j'étais allé me coucher, fatigué. Aujourd'hui, il fait très beau. Le ciel est bleu d'un bout à l'autre de l'horizon, ou plutôt, d'un bord à l'autre de ma fenêtre. Le petit bout de Tage que je peux voir d'ici, scintille. Je vais me mettre au travail.

Le rêve de cette nuit était très étrange. Philippe B. avait pris le boulevard Saint Germain dans le sens contraire à celui de la circulation, mais il avait mis la Jeep qu'il conduisait en marche arrière pour remonter le boulevard. Une manoeuvre assez dangereuse mais il conduisait avec beaucoup d'habileté. Il m'emmenait à une soirée sado-masochiste, ce qui ne me plaisait guère. J'y allais moi aussi à reculons.

J'ai reçu par mail le document de présentation de la nouvelle école primaire à Esch. J'ai trouvé le projet magnifique. J'espère beaucoup que l'équipe avec qui j'ai travaillé va remporter le concours.

lundi 15 février 2016

Aigle Azur

J'écris de Lisbonne où nous venons d'arriver avec un vol de la compagnie Aigle Azur. Grand soleil et ciel bleu au dessus de la ville alors que le chauffeur de taxi qui nous ramène chez nous nous disait qu'il pleuvait encore ce matin. Je défais mes bagages et, enfer et damnation, je ne retrouve ni les herbes ni la mère de kefir que Jean-Maris m'avait donnés à Paris juste avant le départ de Charlotte. Je suis désespéré. Je me réjouissais de faire partir mon kéfir à l'eau que j'avais beaucoup apprécié chez Jean-Maris et voilà, le sachet plastique dans lequel il avait tout mis, a dû rester chez lui. J'ai très envie de dire "Merde", mais je ne ferai que l'écrire ce qui change beaucoup la tonalité de mon ressentiment, n'est-ce pas ?

dimanche 14 février 2016

Eddy



La fête chez Eric et Christine a été magnifique. Eddy et ses musiciens nous ont ravi. Les gens ont chanté, dansé, mangé de délicieuses choses, bu de bons vins, fait connaissance avec beaucoup de gens étonnants, — je pense à Karim, cet être merveilleux qui sait vivre avec les serpents et les crocodiles —, revu René qui nous avait embarqués au large pour jeter les cendres de Jean-Pierre, bref une soirée fantastique. Charlotte n'était pas avec nous. Elle était allée rejoindre sa grande amie Lili et nous sommes allés la retrouver aujourd'hui pour midi. J'ai revu Jean-Marie qui m'a très gentiment donné un petit sachet d'herbes aromatiques pour me faire du thé ainsi que, au dernier moment, une mère de kéfir absolument délicieux que je vais cultiver à Lisbonne. Bref un super séjour à Paris.

samedi 13 février 2016

Fête celtique

Nous nous envolons vers Paris ce matin pour participer à la "fête celtique" qu'Eric a organisé sur sa péniche Mykonos à Joinville. Charlotte vient avec nous et le lendemain elle prendra le train pour Luxembourg. C'est la reprise pour elle. Hier, nous sommes allés chez le dentiste, pour elle également. Lors de son prochain séjour, fin mars, il est prévu de lui enlever deux dents de sagesse d'un coup. Il faut faire de la place aux autres dents. En réalité, j'ai passé beaucoup de temps dans la voiture au cours de la journée d'hier. Heureusement que j'avais mon Kindle. Je lisais Tim Ingold, l'anthropologue qui, dans les années 90, a organisé plusieurs grands débats au sein de la communauté des anthropologues britanniques. Ce sont les compte-rendus de ces débats  que je lisais dans la voiture en attendant Isabel ou Charlotte.

vendredi 12 février 2016

Tennis

Tout d'abord une insomnie de quelques heures, puis un cauchemar. On était dans une sorte de parc et nous nous étions bricolé un petit terrain de tennis pour échanger quelques balles. J'avais une raquette de badminton dont les cordes étaient déformées en entonnoir. Il y avait des arbres tout autour et surtout, beaucoup de monde. Les gens se promenaient sur le terrain. Nous n'avions pas de balles et c'est avec de petits objets ronds que nous voulions essayer de jouer. Je devais servir. Mais c'était impossible pour toutes sortes de raisons : quelqu'un avait suspendu du linge au dessus de ma tête, les gens traversaient le terrain à l'impromptu, le filet était trop haut, surtout beaucoup de gens, une certaine Jeanne entre autres, grande et assez maigre que je reconnais comme une amie, etc., mais toutes mes tentatives de servir la première "balle" échouent lamentablement. Je ne réussissais pas à lancer cette "balle" suffisamment haut pour pouvoir la frapper correctement. Sentiment d'échec très vif. Tout à coup un orchestre militaire a voulu s'installer là où nous étions. Nous réussissons à nous en débarrasser pendant un moment mais ils reviennent. Avec ma raquette, je frappe la tête d'un immense officier coiffé d'un képi à la SS. Il se tourne vers moi, furieux, il a un menton en galoche comme les Dalton —en voilà un qui veut faire le malin, n'est-ce pas ?— il demande à l'un de ses sbires de m'immobiliser, puis force deux de ses doigts en pince dans ma bouche, j'essaye de le mordre, il a des doigts d'acier, et me retire deux dents. Au moins qu'il me les rende, me disais-je. Je me débrouillerai après. Enfin je me réveille, très angoissé, mais avec toutes mes dents.

Cet après-midi je vais chez le dentiste avec Charlotte, justement. Hier, Charlotte nous dit :  "Et si je restais encore une année au Lycée Ermesinde ? Vous seriez d'accord ?" Je lui réponds qu'à mon avis, ce ne sera certainement pas possible. Pour passer en 4e là-bas, l'allemand est indispensable. Parles-en à Jeannot, lui ai-je suggéré. Mais je crains que ce plan ne soit pas réalisable. Ceci dit, cela me faisait plaisir d'entendre ce qui ne peut s'interpréter que comme une appréciation très positive du lycée. Bref, finalement, elle préfère sa scolarité luxembourgeoise à celle que lui offre le Lycée français de Lisbonne.

jeudi 11 février 2016

Vendredi

Je sais, nous ne sommes que jeudi mais le titre de ce message se réfère au livre de Tournier dont j'ai relu de longs passages hier matin pour tenter d'y saisir justement la manière dont l'auteur présente la nature à travers la conversion de Robinson, quand celui-ci quitte ses vêtements et sa barbe, laisse ses cheveux pousser librement et s'adonne au culte du soleil. Le mot "nature" revient assez souvent sous la plume de Tournier, justement pour désigner cette conversion. On se souvient d'ailleurs qu'au moment de choisir entre un retour à la civilisation et son île, c'est bien la "vie sauvage" à Speranza qui aura la préférence du naufragé solitaire tandis que Vendredi par contre, quitte l'île pour la civilisation, se faisant remplacer, sans le savoir, auprès de Robinson par le moussaillon rebaptisé Jeudi. La postface de Gilles Deleuze est également très intéressante.

Dans le droit fil de cette préoccupation, j'ai repris La vigne de Cesare Pavese où là également nous voyons un écrivain décrire une sorte de retour à la nature, non, plutôt un désir de se fondre, nu, dans un bout de nature, à la campagne avec la même volonté d'offrir sa peau au soleil afin qu'elle devienne de plus en plus foncée, presque noire. Se fondre ? Ce n'est justement pas ce qui arrive. Au contraire. La nature ? Une île déserte, de plus en plus déserte, au milieu de l'océan des humains ?

J'ai repris également le livre de François Jullien, De l'essence ou du nu (Paris, Seuil, 2000) à la lumière de cette préoccupation particulière : "ce que la nature a à voir avec la nudité". L'étude comparative du nu dans la peinture occidentale et en Chine —où il n'existe pratiquement pas— est hautement instructive à ce sujet.

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Par ailleurs, je viens de voir dans Le Monde, que les scientifiques sont tout près d'annoncer la découverte des signes qui pourraient témoigner de l'existence des ondes gravitationnelles. Un grand moment de la physique, je présume, aussi important que la mise en évidence du boson de Higgs en 2012.

mercredi 10 février 2016

"666"+6

Comment ai-je pu laisser passer sans rien dire, sans en rien savoir, le 666e message de ce blog, celui qui correspond au jour où j'ai écrit "Sapomos", ce mot qui apparaît dans un rêve fait cette nuit-là, et qui me semble n'être autre chose qu'une déformation de sapemus, en latin : "nous savons" ? Or, dans ce rêve, il s'agit de petites bestioles étranges "entre le scarabée et l'ornithorynque", ce dernier étant lui-même une sorte d'hybride entre le canard et le castor, un sorte de "cantor" si je puis m'exprimer ainsi. Ce jour-là donc, mon message portait sur les "bestioles du savoir". Deux jours plus tard, Martine et Duncan m'offraient le livre de Hubert Wolf, celui que j'ai terminé hier, sur l'affaire du couvent de Saint Ambroise à Rome et qui met en question, très précisément, le pape Pie IX, le vicarius filii dei, le "vicaire" —c'est à dire le "remplaçant" ou "substitut"— du fils de Dieu, celui qui dans l'Apocalypse de Jean se trouve désigné par le nombre 666, le chiffre de la bête. Et bien sûr, les associations affluent, submergeant l'imagination dans une sorte de délire qui n'est pas totalement dénué d'intérêt. Comment ne pas associer mes "sapomos", mes "bestioles du savoir" au tableau de Hieronymus Bosch, Las Tentaciones de San Antonio, devant lequel nous avons passé pas mal de temps au Musée National de Lisbonne et dans lequel le peintre a représenté cette multitude d'êtres étranges, certains dotés de sortes de casques ou de carapaces, qui grouillent sur la terre comme au ciel.

Par ailleurs, j'ai eu cette nuit des idées intéressantes concernant mon projet encore très vague d'écrire un petit livre sur "les représentations de la nature" et qui ne seraient plus sur ce thème, mais quelque chose de très proche. Je n'en dis rien pour l'instant pour laisser mûrir les choses d'elles-mêmes pendant quelque temps, le temps de remplir d'abord mes engagements d'écriture antérieurs.



mardi 9 février 2016

Concaténation

Tout d'abord il y a eu les trois frères : Dominique, Jean-Pierre et moi-même, un soir à Strasbourg, je revenais de mon bureau à l'Institut Le Bel, mes frères attendaient que je range un peu mes affaires et notamment le nombre incroyable de parapluies qui encombraient mon bureau : 19. Mais, c'était du Conseil de l'Europe que nous sommes sortis avec des lettres à poster, les fonctionnaires du Conseil refusant catégoriquement de s'en charger. Nous montons dans ma vieille 2CV grise, toute brinquebalante, et nous nous apprêtons à remonter l'allée de la Robertsau, à ce moment là, je me retrouve dans le souvenir de notre départ de la maison pour aller voir le film Gwendolina, que notre père nous avait interdit d'aller voir...

Puis, dans un autre rêve, je retrouvais Mohamed, du GERSULP après un cours de neurosciences, le premier d'une série de trois auquel j'assistais avec Irène qui me demandait d'arracher une page de mon cahier pour qu'elle puisse prendre des notes. Le prof s'appelait Wachelmann ou quelque chose comme ça. J'invitais Mohamed à venir dîner chez nous mais il me disait qu'il ne pouvait pas. Je lui montrais même la fenêtre de la chambre qu'il occuperait s'il décidait de rester.

Je viens de terminer le livre dont Martine et Duncan m'ont fait cadeau pour mon anniversaire : Le Vice et la Grâce. L'affaire des religieuses de Sant'Ambrogio, d'un auteur allemand, Hubert Wolf (Editions du Seuil, Paris, 2013) qui retrace les événements qui ont marqué la vie du couvent de religieuses de Saint Ambroise à Rome au XIXe siècle et qui ont fait l'objet d'un procès de l'Inquisition de 1859 à 1869. Le livre est remarquable et en dit long sur l'état de l'Eglise catholique à cette époque, l'influence des jésuites à la curie romaine, le rôle ambigu du pape Pie IX, le mysticisme des jeunes religieuses qui se croyaient en communication directe avec les puissances célestes, etc. L'auteur est professeur d'histoire de l'Eglise à l'université de Münster en Allemagne, et a publié en 2009 Le Pape et le Diable, aux éditions du CNRS.

lundi 8 février 2016

Keaton

Hier nous sommes d'abord allés au Musée National de Lisbonne avec Martine et Duncan. Nous sommes évidemment tombés en arrêt —comme tout un groupe de touristes que l'une des guides du Musée a retenu devant l'œuvre pendant une demi-heure avec un flot ininterrompu de paroles— devant Tentaciones de Jeronimus Bosch. C'est un tableau magnifique et visionnaire. J'essayerai tout-à-l'heure de mettre une photo que j'ai prise avec mon téléphone. Mais on peut rester longtemps devant ce tableau en tentant de comprendre chaque détail, chaque personnage fantastique, le poisson qui vole dans le ciel avec une  femme en amazone sur son dos, le regard de Saint Antoine vers cette table soutenue par les jambes d'une femme nue renversée, ces êtres imaginaires qui peuplent nos rêves et qui grouillent sur la toile des fantasmes que nous partageons encore aujourd'hui avec le peintre...

Le soir nous sommes allés pour le première fois dans ce restaurant, O Talho —ce qui veut dire "le boucher"— dont le chef est le même que A Cevicheria, dont j'ai déjà parlé à plusieurs reprises — et qui est spécialisé dans la viande de veau. C'était délicieux. Un peu cher certes mais la cuisine était vraiment excellente. Entre les deux j'ai quand même une préférence pour A Cevicheria, spécialisé dans le poisson cru mariné comme au Pérou.

Après ce bon repas, nous sommes rentrés et j'ai regardé sur Arte le film de Buster Keaton, Le Mécano de la Générale qui passait après un documentaire sur la vie de cet acteur réalisateur si extraordinairement poétique. Passionnant.

dimanche 7 février 2016

Canard

J'étais sur les pistes de ski dans mon dernier rêve. C'était très agréable. Il y avait beaucoup de neige et bien entendu, je skiais sans la moindre de ces hésitations maladroites qui caractérisent mon style habituel dans le réel. Si tant est que l'on peut parler d'un style. Le site était magnifique et je devais déplacer la voiture pour monter plus haut. Je me demandais comment j'allais faire avec toute cette neige. Heureusement que je venais de changer les pneus. Cette dernière remarque correspondait à la réalité, puisqu'effectivement, je viens de changer les pneus de la voiture.

Hier nous avons eu un très bon dîner. Un canard à l'orange dont la recette a été plus ou moins improvisée par Martine et moi. Des carottes au miel et des panais cuits au four. Le tout arrosé d'une sauce délicieuse que Martine a improvisée avec un fond de soupe au potiron.

Il fait encore assez froid à Lisbonne pour le moment. C'est vraiment l'hiver.

samedi 6 février 2016

Clemencini

L'avion est arrivé avec cinq minutes de retard. J'ai pu accueillir Martine et Duncan très rapidement. Ils avaient l'air en forme. Ils resteront à Lisbonne jusqu'au 9 février. Nous avons dîné avec un bar délicieux, pêché la veille à Sesimbra, magnifiquement cuisiné par Isabel. Ils m'ont offert un livre qui paraît-il est passionnant : Le vice et la grâce, que je me réjouis de lire.

Cette nuit, j'ai fait un drôle de rêve. Je rendais visite aux jésuites chez qui j'allais pour faire mes devoirs quand j'étais au lycée Fustel de Coulanges. Je rencontre le père Dufahy —je ne sais pas s'il s'appelait vraiment comme ça — qui, en me voyant, s'écrie "Clemencini !" je suis très content qu'il me reconnaisse aussi facilement après avoir vu défiler des centaines d'élèves comme moi et suis en même temps un peu surpris de m'appeler Clemencini.

Le ciel est très nuageux ce matin et j'entends le vent souffler en rafales sur les toits.

vendredi 5 février 2016

Rêve lucide

Beaucoup de rêves cette nuit. Le dernier mettait Régis de L. en scène. Nous étions dans le métro à Paris et nous retournions vers l'Université Paris Rive Gauche. C'était la ligne noire mais je n'étais pas certain et je cherchais partout des cartes pour être sûr de mon itinéraire. A un moment donné nous profitons d'un arrêt pour sortir. Régis me demande l'heure. Je me souviens que ma montre est restée dans mon pantalon qui se trouve dans la machine à laver. Mais j'ai mon smart phone, —hhha !— que je consulte. En fait, pour qu'il puisse marquer l'heure il faut en enlever une partie. Mais le métro s'apprête à repartir. Nous nous précipitons. Nous descendons tous les deux à Jussieu en laissant les autres poursuivre vers Paris Rive Gauche. Nous sommes dans une ruelle très étroite. Il y a beaucoup de monde. Nous projetons d'aller manger dans un restaurant que nous connaissons tous les deux et nos routes se séparerons ensuite.
Avant ça, il y avait une histoire de Colloque et avant encore, Feyerabend avait été mon personnage onirique principal. Bref, des insomnies, des rêves, des insomnies et encore des rêves.

Je pense à Julien, le fils de Célia, qui s'intéresse au rêve lucide. J'avais rencontré, quand j'étais à Strasbourg, un doctorant qui terminait une thèse sur cette question. Son rêve (!) c'était de rêver qu'il se rendait dans une bibliothèque, qu'il choisissait un livre qu'il n'avait jamais lu auparavant, qu'il l'ouvrait, se mettait à lire. Au réveil il espérait pouvoir se souvenir de ce qu'il avait lu dans son rêve. Je sais qu'il est devenu professeur de psycho un peu plus tard. Mais je ne sais pas s'il a réalisé cette performance. Néanmoins, il était capable de rencontrer des personnes dans ses rêves, personnes qui réussissaient à rêver ces rencontres, et qui pouvaient ensuite en témoigner en évoquant très précisément ce qu'ils s'étaient dit pendant le rêve. Qui veut essayer avec moi ?



jeudi 4 février 2016

Sapomos

Ce sont des petits animaux bizarres qui sortaient d'une grande éponge de vaisselle verte pliée en deux. Les sapomos sortaient du pli de cette éponge. A mi-chemin entre des scarabées et des ornithorynques, ils se multipliaient et Irène me disait que la première fois qu'elle avait vu ces bestioles ça lui avait "sali les yeux". J'ai oublié ce qui précédait cette scène et qui avait certainement de l'importance mais, au fond, peut-on dire que les événements oniriques peuvent, ou non, "avoir de l'importance". Si l'on en croit Grothendiek, bien sûr que les événements du rêve sont tous très importants car ce sont des messages que nous pouvons comprendre, ou non.

Il y a beaucoup de vent dehors et je vois les antennes de télé sur le toit d'à côté osciller dangereusement. Le ciel est légèrement cotonneux mais on distingue encore un croissant de lune d'argent à travers ses voiles.

Je voudrais absolument me remettre à la méditation le matin. Une demie-heure suffirait mais c'est le moment de la journée où j'ai le plus de choses diverses à faire. J'ai lu hier un petit livre d'Erwin Ingold sur la question et j'ai trouvé ça très convaincant.

mercredi 3 février 2016

Facebook

On n'y échappe pas. Je n'ai jamais reçu autant de vœux pour mon anniversaire qu'hier. Grâce à Facebook comme beaucoup me l'ont dit. Bon ! Cela n'arrive qu'une fois par an. Mais, pour quelqu'un comme moi qui n'utilise pas ce réseau social, cela reste étonnant. Et certains amis, tout comme mes enfants ou mes frères et sœurs, n'ont pas eu besoin de Facebook pour m'écrire ou me contacter sur Skype. C'est rassurant.

Hier j'ai lu sur mon kindle un petit ouvrage intéressant de Gerald Bronner, La Planète des hommes. L'auteur passe en revue les fantasmes de fin du monde qui se multiplient dans les médias, donnant au pessimisme ambiant une résonance particulière. Il compare cette paranoïa à la manière dont, en 1900, on imaginait l'an 2000. C'est vraiment drôle. Les hommes à ce moment-là étaient plus optimistes qu'aujourd'hui. Ils imaginaient le ciel encombré d'engins volants de toutes sortes dont certains pouvaient vous débarquer chez vous en s'amarrant à votre balcon. Bien sûr, de larges colonies s'étaient développées sur Mars où on allait faire du ski en été tandis que Venus nous accueillait avec de douces chaleurs en hiver. Les repas consistaient à prendre deux ou trois pilules particulièrement nourrissantes et je suppose qu'en l'an 2000, les hommes vivaient jusqu'à 150 ans. Heureusement que nous n'en sommes pas là et qu'hier soir, pour mon 74e anniversaire, j'ai pu déguster cette délicieuse sole toute fraîche accompagnée d'un vin blanc du Douro parfaitement adapté. Avec, pour finir, un gâteau délicieux. C'était parfait. Merci Isabel.

mardi 2 février 2016

Ouf

Donald Trump a perdu les primaire du GOP dans l'Iowa. C'est la bonne nouvelle de la journée. Et il n'est pas impossible que Bernie Sanders puisse l'emporter sur Hilary Clinton. Je sais que, quel que soit celui qui l'emportera, cela ne fera pas de grandes différences dans le dérèglement actuel du monde : le creusement des inégalités, le réchauffement climatique, les guerres du Moyen-Orient, etc. Mais, quand même, je suis content que Donald Trump n'ait pas remporté cette victoire si ardemment prévue par les médias. Et j'avoue que je n'ai guère confiance en Hilary Clinton pour changer quoi que ce soit. D'ailleurs ce n'est pas son but. Elle se dit elle-même dans la continuité d'Obama. C'est bien, certes, mais ça pourrait être mieux, surtout en ce qui concerne son attitude réservée vis-à-vis des inégalités.

Ce soir, nous mangerons une sole toute fraîche. Je m'en réjouis. Avec un vin du Douro.


lundi 1 février 2016

Orange

Le ciel est d'une magnifique couleur orange ce matin, une couleur uniforme qui envahit tout l'horizon jusqu'au milieu du ciel. Mais ça change très vite. Du fond de cet horizon justement, où l'on distingue quelques pans de nuée, l'orange est devenu rose, puis rouge, un rouge doré qui annonce l'arrivée du soleil dans le ciel et qui s'attache aux détails célestes, révélant des bribes de nuages qui moutonnent et broutent l'herbe bleue. Je lève les yeux et m'aperçois que le troupeau a disparu dans une transparence qui s'ouvre sur un azur apparemment complètement dégagé. On dirait qu'une belle journée se prépare à Lisbonne.

Hier, nous sommes allés déjeuner chez Lucia et Pedro. Moments très agréables de détente sereine. C'est une famille de musiciens. Lucia termine un doctorat sur la voix humaine. Je lui avais conseillé de lire David Abram et elle a trouvé l'ouvrage intéressant et utile.

Je vais m'y remettre moi aussi pour finir ma contribution à la publication de l'escale de recherche du lycée Ermesinde. Bref, une belle journée et beaucoup de travail pendant que Charlotte ira à l'hôpital avec Isabel pour voir où en sont ses problèmes d'allergie.

Sans que je puisse voir son origine à l'Est, je m'aperçois néanmoins qu'une tangente lumineuse à la courbe terrestre frappe les carreaux des immeubles regroupés sur la colline, comme un troupeau de lapins fascinés par ce brusque faisceau de rayons aveuglants. Le soleil s'est levé.