Au cours de l’insomnie de cette nuit —qui n’a pas duré très longtemps— j’ai repensé à certaines figures de mon passé et, notamment, à Zbyscek, cet ami ange-polonais [j’avais écrit « anglo-polonais » mais l’ordinateur m’a proposé ce beau lapsus que je ne corrige qu’aujourd’hui, c’est-à-dire, le lendemain !], qui est mort en septembre 2017. Je me souviens que Zbyscek était très préoccupé par le fait d’être une « bonne personne ». Il me posait souvent la question sans pourtant, qu’il en doutât un seul instant. Je crois qu’il avait raison. C’était très certainement une « bonne personne ». Mais on ne peut pas s’empêcher de poser la même question à propos de soi-même : suis-je une « bonne personne » ? C’est d’ailleurs les termes mêmes que Zbyscek utilisait pour exprimer sa préoccupation. Quant à moi, cette question m’a immédiatement fait penser aux personnes que j’ai connues et qui, non seulement ne me considéraient pas comme une bonne personne, mais au contraire comme quelqu’un de sulfureux, une émanation du diable lui-même ! Je pense à mon ancien professeur de logique à la Faculté de Philosophie de Strasbourg, Hervé Barreau, qui, paraît-il, me considérait véritablement comme le diable. Je me suis demandé ce qui pouvait fonder cette opinion très négative. Comme toujours, quand il est question de diable, il y a le problème de la séduction. Le séducteur est un diable. J’ai longtemps été considéré comme un grand séducteur. Cela m’étonnait dans la mesure où je ne ressentais aucunement cette intention de séduire, telle que Kierkegaard en parle dans son ouvrage célèbre. Mais l’intention est-elle indispensable pour définir le séducteur ? En tout cas, je ressentais très nettement cette méfiance dans l’attitude que certaines personnes, comme Hervé Barreau par exemple, exprimaient à mon égard.
Cela me fait évidemment penser au diable dans le film de Marcel Carné, Les visiteurs du soir, film qui date de 1942, l’année de ma naissance. Jules Berry, dans le rôle qui lui a été confié d’être le diable dans ce film magnifique, me semblait absolument génial. C’est un film qui nous montre clairement que le mal vient de la séduction justement.
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