Il est assez normal que, pendant les fêtes, les gens réunis en un seul lieu pour se retrouver et restaurer leurs liens fassent beaucoup de bruit : éclats de voix, exclamations de surprise, rires, propositions d'activités communes, jeux, discussions vives, etc. Il faut accepter ces bruits humains, les supporter sereinement, voire y contribuer avec sa propre voix... Hier cependant, de connivences avec ma fille Célia, nous avons souhaité une minute de silence complet. Célia me propose de l'obtenir pendant vingt secondes. Elle frappe quelques coups de couteau sur un verre —cling, cling, cling— pour attirer l'attention, ce qu'elle obtient sans difficulté, puis elle se tourne vers moi pour me passer la main ce qui mobilise l'attention de presque toute l'assemblée sur une interrogation muette, une attention en suspens qui fabrique le silence justement, qui le creuse doucement, le fait se propager des uns aux autres, sans raison, même si pour certains, cette attention devient une attente, l'attente d'une annonce, voire d'un discours, en tout cas d'un événement alors que pour moi, et je l'espérais, pour tous, l'événement, c'est justement ce silence soudain, qui se prolonge, s'épaissit comme une obscurité vocale qu'il me semble impossible d'interrompre par quelque bruit que ce soit. Juste le silence. Pour lui-même.
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