Je lis ce matin dans Le Monde, un article de Navalny sur ce qu’il estime être l’un des grands problèmes que les gouvernements d’aujourd’hui devraient résoudre lors des réunions internationales où ils adorent se rencontrer pour discuter de tout sauf de ça : la corruption. Et, synchronicité remarquable, quand je me replonge dans le livre de Nicolas Bouvier, je tombe sur ce passage :
« C’est une erreur de dire que l’argent roule ; il monte. Monte par inclination naturelle, comme le fumet des viandes sacrifiées jusqu’aux narines des puissants. L’Iran n’a évidemment pas le monopole de cette propriété universelle, mais à la prison de Mahabad, elle se manifestait dans toute sa candeur.Ainsi pour devenir gendarme, le zèle ne suffit pas ; il faut mériter cette distinction en offrant quatre cents tomans au lieutenant de police qui n’en profite guère, puisqu’il en remet le double au colonel pour mériter la sienne. À son tour, le colonel serait bien léger d’oublier tout ce qu’il doit au commandant de la province, qui a lui-même nombre d’obligations à Téhéran. Cet usage n’a rien d’officiel ; les plus pointilleux le déplorent et les plus stoïques s’en abstiennent, mais l’insuffisance des traitements en fait une nécessité et il est difficile de s’y soustraire sans court-circuiter tout le système et s’attirer la malveillance par son ostentation. En fait, il prévaut généralement, l’argent poursuit allègrement son ascension et, comme tout ce qui a été élevé doit un jour redescendre, finit par retomber en pluie bienfaisante sur les banques suisses, les champs de courses, ou les casinos de la Riviera. » (p. 180)
Ce passage se trouve à la suite de la description par l’auteur de son séjour forcé à Tabriz, séjour dont il nous offre une description fascinante. C’est l’hiver. Les deux voyageurs y sont bloqués par la neige qui les empêche de poursuivre leur voyage. C’est là qu’ils côtoient les Arméniens et les Kurdes. Aux pied du mont Ararat, en Azerbâyjân.
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