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mercredi 4 août 2021

Non-dire

 Au cours de la discussion que nous avons eue hier soir devant les sashimis, alors qu’un nuage noir traversait doucement le ciel et rendait encore plus beau ce magnifique coucher de soleil, nous avons évoqué le fait qu’aujourd’hui, en particulier aux États-Unis, il fallait, de plus en plus souvent, annoncer la couleur, c’est-à-dire, prévenir son éventuel partenaire sexuel futur, de son identité de genre : « Je suis hétérosexuel, bi, trans, gay, lesbienne, etc… » Bref, il s’agit de placer la rencontre sous le signe d’un jeu d’étiquettes identitaires qui sapent à la base toute possibilité d’expérience de la découverte. Je me disais que cela vaudrait la peine d’écrire un article sur cette particularité du monde moderne avec, pour titre, « l’interdit du non-dire ». Cela rejoint l’une de mes marottes d’intello : le fait que l’on tend à minimiser l’importance de ce qui est implicite, de ce qui relève du non-dit et dont l’absence rend toute négociation quasiment impossible. On se tient sur ses gardes et l’on affiche directement ce qui apparaît dès lors comme non-négociable. Tout doit être apparent, dit, montré, ce qui rend difficile le surgissement de surprises dans nos rapports avec les autres, dans l’imprévisibilité de nos rencontres. C’est un monde où la lumière perd la multiplicité des ombres qu’elle engendre avec ce qu’elle cache. C’est un monde sans refuge, assez triste en fin de compte, mais où la tristesse elle-même n’a pas lieu d’être. 



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