Je lis dans le roman de Witzel, page 442 : "Ce qui est sans visage éveille toutefois en nous un sentiment de pitié encore plus profond, qui pénètre presque dans le domaine indifférencié de l'âme. Quand, par exemple, j'observe dans mon cendrier les mégots de cigarette qui, petits êtres sans visage dans leur petite peau blanche, finement rayée etpresque invisible, se recourbent dans la flaque de cendres de ce vieux dessous-de-plat, je ressens plus de sympathie que je ne pourrais jamais en éprouver pour un homme qui me regarderait fixement et d'un aire désemparé.
Et c'est précisément parce que nous ne supportons pas ce sentiments de pitié que nous devons tout de suite et partout reconnaître des visages : les deux mégots de cigarettes se courbent dans l'arrondi du cendrier pour devenir des sourcils, l'encorbellement se transforme en nez de la maison, son toit en un chapeau au dessus duquel rit une large lune. Tout est tellement visage à nos yeux que nous pourrions à tout moment prêter des yeux, un nez, une bouche et des oreilles à n'importe quelle entité, si amorphe fût-elle, et à la place précise où il font défaut."
Il y aurait beaucoup à dire autour de ce passage et de cette capacité que nous avons de voir (reconnaître) des visages humains dans des nuages, dans de vieux sacs jetés dans un coin, dans le fond d'une poubelle, un jeu de broussailles ou un pan de montagne enneigée. Il s'agit de paréidolie. Nous activons à ce moment-là une aire particulière de notre cerveau dans la région occipitale, l'aire 17 de Broadman, si je me souviens bien, dans notre hémisphère droit, symétrique de l'aire qui, à gauche, est spécialisée dans la lecture.
Hier nous sommes allés manger avec Richard, Lucia et Pedro dans un restaurant végétarien bon marché et excellent, recommandé par Richard. Après quoi, nous sommes allés prendre une tisane dans le petit jardin très fleuri et odorant de Lucia et Pedro.
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