Je viens de lire le petit livre de Jean-Pierre Siméon, La poésie sauvera le monde, Editions Le Passeur, 2015. Jean-Pierre Siméon est lui-même un poète et directeur artistique du Printemps des poètes (2001-2017).
Voici quelques passages de cet essai magnifique et convaincant :
Page 51 : "L'intransigeance du poème à n'être que poème, qui fait son étrangeté irréductible et par conséquent le protège de l'inclusion dans la grande machine à aplatir le réel, n'est pas négociable. Sans conteste le poème (...) demande un effort. Mais ce n'est pas un effort conceptuel. Il ne demande que des capacités dont tout le monde est originellement pourvu autant que de nez et d'oreilles : le silence, la lenteur, la patience, bref l'attention qui est immobilisation de tout au profit de la mobilisation de la conscience. "Les poèmes sont aussi des présents, des présents destinés aux attentifs", affirmait Paul Celan."
Page 53 : "Entendant le poème, on perçoit — même un enfant le perçoit — d'instinct que c'est de la part manquante du réel — qui nous manque autant que nous la manquons — dont il est question. C'est affaire d'intensité."
Page 56 : "...je tiens que la poésie propose une alternative à la religion — ou aux superstitions — qui traditionnellement l'assume, en laïcisant, si je puis dire, l'au-delà espéré. C'est que la poésie n'est pas une mystique : elle ne se détache ni du corps du monde ni du corps social. Elle envisage une transcendance interne, ce que Paul Eluard signifiait quand il affirmait : "Oui, il y a un autre monde mais il est dans le monde."
Page 65 : "... la lecture active du poème ouvre et libère la conscience. Or la conscience libre fait le citoyen libre. Donc la poésie est la condition d'une cité libre."
C'est bien de cette liberté que Platon ne voulait pas quand il chasse les poètes de la Cité dans le Livre X de La République.
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