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mardi 13 février 2018

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Il est toujours émouvant d'accueillir dans ses rêves des personnes pour lesquelles on avait beaucoup d'estime et d'affection qui sont mortes depuis longtemps. Cette nuit, j'ai donc reçu Jean-Jacques Salomon, mort en 2008, historien des sciences et l'un des fondateurs (avec moi et quelques autres) du champ STS en France, et son épouse, Claire Salomon-Bayet, disparue en 2016, et qui a eu une grande importance dans ma carrière puisque c'est elle qui, après avoir lu ma thèse d'Etat, a convaincu son mari de l'intérêt de ce travail très peu orthodoxe, il faut le dire.  Je me souviens très bien avoir assisté à la cérémonie de crémation de Jean-Jacques Salomon au Père Lachaise à Paris.


Ensuite, je vois une scène qui implique mon ex-belle-mère, Agnès Schlumberger, disparue en 2011 à la veille de ses 100 ans. Je la rencontre au sommet des escaliers de sa maison rue Richard Brunck et je la serre dans mes bras. Nous étions tous les deux très émus. Elle aussi, avec son mari Daniel Schlumberger, par l'accueil qu'ils m'ont réservé dans leur famille, a eu une très grande importance dans mon évolution intellectuelle. 

Peut-être que ce qui a ravivé mes souvenirs de ces morts, c'est la lecture que j'ai terminée hier soir de la thèse de Lionel Maillot qui sera soutenue le 2 mars à Dijon, thèse qui traite des effets sur eux-mêmes de l'engagement de jeunes chercheurs dans des pratiques de vulgarisation scientifique. C'était là l'une des caractéristiques de ma propre thèse soutenue en 1973 : la vulgarisation scientifique bénéficie moins au public auquel elle s'adresse qu'aux scientifiques qui la pratiquent, car c'est par ce biais notamment qu'ils peuvent sauver leur âme si l'on en croit cette célèbre affirmation de Rabelais : "Science sans conscience n'est que ruine de l'âme". Pas de conscience, sans réflexivité. Or le discours scientifique hautement spécialisé exhibe un déficit de réflexivité qui peut se trouver compensé par des pratiques de vulgarisation car celles-ci exigent qu'on prenne le risque de ne pas se reconnaître soi-même dans ce que l'on dit à l'autre parce que, justement, l'autre, dans sa dimension d'inconnu, y prend une part active. Telle était la thèse que je défendais.

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