C'est, comme d'habitude, à la dernière minute que Charlotte s'est mise au travail pour écrire sa dissertation littéraire sur la place d'Hernani de Victor Hugo et du romantisme dans la littérature française. Je connais bien ce comportement pour l'avoir eu moi-même. Ce qui conduit à faire les choses à la hâte. Cette hâte peut parfois être productive, surtout si elle est précédée d'une longue préoccupation sur le sujet à traiter, ce qu'on appelle la période de gestation. Je savais, bien sûr, ce qui allait arriver. J'avais donc relu Hernani —qui ne m'avait laissé que de très vagues souvenirs— en pensant à l'avance à la collaboration qui me serait demandée au dernier moment. À plusieurs reprises, j'ai pressé Charlotte de se préparer, de lire la pièce de Hugo, de se documenter, de me prévenir de ce qu'elle aurait à faire et pour quand. Et ce n'est qu'hier soir qu'elle me sollicite, sans s'être véritablement préparée à l'avance. Nous avons travaillé ensemble jusqu'à 1h du matin. Nous aurions dû reprendre ensemble la préface à Cromwell dans laquelle Hugo expose ses idées sur le renouveau de la créativité littéraire, mais nous n'avions pas le temps.
Je pense que Charlotte a beaucoup de mal à s'imaginer qu'un travail sur une pièce du XIXe siècle pourrait être intéressant. Pour imaginer cela, il faut s'abstraire quelque peu des soucis du présent, oublier son téléphone, ouvrir une parenthèse mentale et temporelle pour se concentrer sur un truc qui, a priori, n'a n'a aucune urgence vitale.
Ce qui m'étonne chez Charlotte, c'est le calme avec lequel elle se met au travail : aucune anxiété, aucun signe de ce sentiment d'urgence qui, moi, me mettait dans des états voisins de la panique. C'est certainement un atout. Mais ça ne peut sans doute pas résoudre tout les problèmes quand elle sera en situation d'examen.
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