Nous avons passé une partie de la journée d'hier devant la télévision qui ne parlait que de cette immense élan de solidarité du peuple de France. C'était assez impressionnant, même à la télé. Beaucoup de témoignages recueillis par des journalistes auprès de gens ordinaires venus là, "pour être là" comme le disait l'une des personnes interpellées à qui,on avait demandé :
"Pourquoi êtes-vous là ?". Bref on nageait en plein dasein, car ce n'était certainement pas le seul à ne pas pouvoir rendre vraiment compte des raisons pour lesquelles il était là, juste là, sans plus. Bien sûr, il y avait la solidarité, la défense de la liberté, de la démocratie, etc., etc. Mais me trompé-je en pensant qu'il y avait aussi ce "là" étrange : je suis un, là, parmi plus de trois millions de Charlie pour ne pas dire autre chose que "je suis là". Cette réponse que j'ai saisie au vol des images qui nous parvenaient était très émouvante et, faut-il le dire, un peu incompréhensible. Est-ce pour cela que les présentateurs ont appelé à l'antenne plusieurs philosophes à la rescousse comme s'ils avaient besoin d'aide pour comprendre. Je ne trouve pas d'ailleurs que ces philosophes nous aient vraiment éclairé. Pourquoi ne pas préserver cette petite (?) zone d'incompréhensibilité dans un événement aussi fantastiquement immense ?
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En en discutant sur Skype avec Samantha ce matin, j'ai évoqué l'idée d'une mise en jeu, dans cet événement, de notre appartenance identitaire et surtout, de sa localisation, ce qui est impliqué par cette insistance sur là, dans "être là". A une époque globalisée où le lieu où l'on vit compte de moins en moins pour définir et engager notre identité, cet événement est devenu un prétexte pour s'opposer à ce décollement de l'identité de son ancrage dans un lieu concret, dans un espace familier. Beaucoup de témoignages ont également évoqué leur motivation par une référence qui faisait appel à l'idée qu'ils participaient à quelque chose d'historique. "Quand mes petits enfants m'interrogeront là-dessus, je pourrai leur dire : "Oui ! J'y étais"." Il faut donner à ce "y" toute l'importance qu'il a quant à la jouissance identitaire qu'il induit. Et la dimension mondiale qu'a pris l'événement a, selon moi, quelque chose à voir avec ce besoin planétaire d'ancrage dans un là dont personne ne pourra jamais gommer l'importance pour les humains. Nous avons assisté au triomphe du local contre le global. Et paradoxalement, il s'agit aussi du triomphe de l'ouverture contre la fermeture. Car rien ne s'ouvre qui ne soit très précisément localisable.
It was still amazing to go Monday evening to place de la Republique, with the candles, writings, people taking photos, wandering around still being 'present'. Something has changed in Paris, and I wonder whether it will ever be the same again.
RépondreSupprimerThank you for your comments, Fianna. They emphasize the idea of "being there" which, I think, gives its singular dimension to the greatest meeting in Paris and in the whole of France since the liberation.
RépondreSupprimerAlong the same lines of thought, I've read several papers criticizing Obama for not having come to Paris and doubting about its loyalty as one of the most faithful ally of France. Again, critiques were aiming at his identity as an ally more than at the political significance of such an absence.
RépondreSupprimerBaudouin I was also surprised. He has since admitted it was a mistake but one explanation may be that the US often takes center stage in the fight against terrorism so wanted perhaps to allow Europe to be the focus. At least the day of the events a week ago, Secretary of State Kerry made an impressive speech of support in French...
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