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vendredi 24 avril 2015

Verbos


Hier après-midi, en revenant avec Isabel de l’hôpital où j’ai subi quelques examens en rapport avec ce qui se révèle être en effet une sténose, nous passons devant l’antiquaire où, quand nous sommes arrivés à Lisbonne, j’avais acheté une bibliothèque XIXe, pour mes livres de la Pléïade, les cinquante volumes des œuvres de Voltaire et mes auteurs grecs favoris. « Tiens, me dit Isabel, si nous allions dire bonjour à Raoul ou son fils Alexandre ? » « D’accord, répondis-je, mais pas longtemps. Z. m’attend pour le déjeuner. » Nous entrons dans ce magasin d’antiquités, très encombré par toutes sortes de merveilles, notamment des lustres gigantesques et magnifiques. Ni Raoul, ni Alexandre ne sont disponibles mais nous faisons quand même un tour. Parmi tous les meubles exposés je repère une chaise dont l’assise était mobile : un vieux livre était coincé entre l’assise et son cadre justement pour montrer qu’en se soulevant, l’assise transformait la chaise en un prie-dieu. Curieux, je la soulève et le livre tombe par terre. Je le ramasse prestement et jette un coup d’oeil sur le livre.  Je lis le titre : Os três verbos da vida, par João Mendes, S.J. (Portugalia Editora, Lisboa, 1944) ! Les trois verbes de la vie. Je le montre à Isabel qui, bien entendu, connaissant mon intérêt très actuel pour les verbes qui m’inspirent de petits textes très fragmentés et ponctuels (que je publie parfois sur mon blog), me propose de l’acheter. En fait, l’antiquaire m’en fera cadeau. Une fois dehors, la curiosité me fait ouvrir le livre tout de suite pour voir quels sont ces « trois verbes de la vie » qui ont inspiré l’auteur. Les voici : Crer, esperar, amar (croire, attendre, aimer). J’ai déjà traité « croire » et « attendre » mais je ne me suis pas encore attaqué au verbe « aimer ». J’y viendrai sans doute un jour. J’ai déjà publié mon fragment sur « attendre » (voir le 17 avril) que je n’ai pas flanqué de sa connotation d’espoir, plus naturelle en portugais et sans doute plus conforme au sens visé par mon jésuite portugais. Voici mon traitement très succinct (et encore en chantier) de « croire ». 

Croire
La croix du croire. Une lourdeur dans la tête pour se sentir léger, débarrassé de toutes les questions de plomb. Allez creuser vos doutes ailleurs. Allez fouiller vos greniers dans vos caves. Je fais une croix sur vos propositions hasardeuses, vos discours retors, vos examens pinailleurs, vos arguties d’intellos. Je fais une croix sur tout. Laissez-moi croire en paix.

Rien à voir évidemment avec le texte que j’ai trouvé coincé entre l’assise et son cadre d’un prie-dieu, comme il est facile de le deviner. Dès les premières lignes de son traitement du verbe croire, l’auteur associe son importance actuelle au progrès des connaissances : « Du berceau au tombeau, tout homme vit de la foi en ce que lui disent les autres. » (p. 13). Ce avec quoi, je suis d'accord. L'entièreté de notre savoir et de l'ameublement de notre esprit nous vient de l'extérieur de nous-même. Mais  ceci l’amène, quelques lignes plus loin, à affirmer : O homem que menos precisa de crer é o selvagem da floresta. « L’homme qui a le moins besoin de croire est le sauvage de la forêt. » J’en conclus que je suis sans doute un sauvage.  Il n’empêche que j’ai trouvé cette trouvaille accidentelle quelque peu troublante. En suis-je troublé ? Juste assez pour tenter de traiter ce verbe intéressant : troubler. Mais ce sera pour une autre fois.

Cette nuit, un rêve, le dernier de la nuit et que j'ai rêvé deux fois (cela arrive rarement : deux versions très semblables du même rêve, l'une à la suite de l'autre). J'étais à vélo et remontais la rue Brûlée à Strasbourg vers la cathédrale. Françoise me suivait tant bien que mal dans cette petite ruelle où nous nous faisions dépasser dangereusement par des voitures. Au bout de la rue, et après avoir esquivé habilement quelques chicanes en métal, j'arrive à ce qui aurait dû être la cathédrale mais en fait, il s'agissait d'un fossé, comme si le sens de la verticalité de la cathédrale s'était inversé et qu'au lieu de hauteur j'avais affaire à de la profondeur. La ville continuait là en bas. Je m'apprête à faire comme d'habitude, c'est-à-dire à sauter tout en restant sur mon vélo. Il y a quelques obstacles mais en tournant le coin, j'ai le champ libre et je saute. Je me réceptionne en bas, toujours sur mon vélo et je continue ma route.

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