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lundi 16 novembre 2015

Bruits

Il y a le bruit des avions qui, en ce moment même, traversent le ciel de Lisbonne. Le vent doit avoir changé de direction car l'approche de l'aéroport se fait autrement et les avions se font entendre un peu plus qu'avant. C'est un bruit presque continu. Il s'atténue parfois un peu mais, très vite, il remplit à nouveau tout le ciel, un ciel blanc de brume qui ne bleuit qu'à la verticale.
Il y a aussi le bruit et la fureur des médias à la suite des attentats de Paris. Ce matin, les avions français ont bombardé Raqqa en Syrie. Retaliation en anglais, représailles, vengeance. L'escalade se poursuit, vers quels sommets ? j'ai peine à m'imaginer les cimes de l'horreur à atteindre quoique le pic où l'on vient d'arriver ait déjà frôlé l'inimaginable, un inimaginable qui pourtant est fréquent, frôlant la banalité dans l'autre monde, à Beyrouth, en Tunisie, en Turquie, au Yemen, en Libye, en Palestine, dans le nord du Kenya...
Unité, unité, coopération, clame-t-on pour résoudre les problèmes de la violence. Il faut beaucoup de violence, d'une autre sorte, certes, pour réussir l'unité. L'unité, c'est aussi ce que veulent les djihadistes, sous la bannière noire du califat, ils veulent se débarrasser pour toujours de tous les mécréants que nous sommes. Ne serait-ce pas plutôt l'acceptation de la diversité qui devrait guider nos pensées sinon nos mouvements ? Evidemment, nous les accuserons d'être les premiers à ne pas l'accepter, ce qui est sans doute vrai. Mais l'acceptons-nous vraiment, nous-mêmes ? Sommes-nous capables de donner l'exemple ? Il faut dire que pour donner l'exemple de la diversité — d'une diversité assumée, vécue, désirée — il faut être plusieurs et différents les uns des autres. Le paradoxe est là, brutal : c'est ce que nous sommes justement.

Lisons René Char ("Le rempart de brindilles", page 359 des Oeuvres complètes aux Editions La Pléïade)  :
"Le dessein de la poésie étant de nous rendre souverain en nous impersonnalisant, nous touchons, grâce au poème, à la plénitude de ce qui n'était qu'esquissé, ou déformé par les vantardises de l'individu.
Les poèmes sont des bouts d'existence incorruptibles que nous lançons à la gueule répugnante de la mort, mais assez haut pour que, ricochant sur elle, ils tombent dans le monde nominateur de l'unité."

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